Un extraterrestre sur l’arche de Noé

En Alaska, chaque port avait son flic en faction sur les mâts des bateaux

Et souvent sa concierge, balayant sans relâche le fond de l’eau,  sous les pontons en dessous des coques  (spécialement des bateaux de pêche),  par peur de laisser traîner un poisson qui ferait désordre dans le paysage.

Puis, plus au sud, le flic du port a laissé courir un maraudeur, qui sous ses airs de dandy flegmatique est un fin bec et, dès qu’on  a le dos tourné, se sert furtivement dans le garde manger communautaire.

A la marina d’Anacortes, à deux kilomètres à peine d’un énorme terminal pétrolier qui crache de la fumée (blanche) 24h sur 24, nous pensions être tranquilles. Mais le havre de Jim nous a réservé quelques belles surprises. Si le flic a cédé sa place à des patrouilles volantes de cormorans, le maraudeur court toujours. Nous l’avons pris en flagrant délit sur le ponton de Chamade, le soir même de notre arrivée et on l’entend toujours  rôder entre les bateaux. Mais au moins, lui, il est discret. Pas comme les fêtards du ponton de fuel qui ont commencé à s’aboyer dessus pour prendre la meilleure place et à faire un chahut de tous les diables à peine la nuit tombée.  Cela a même failli finir en rixe. A 20 heures  ils étaient cinq et le matin il n’en restait plus que trois, avec visiblement la gueule de bois  (les effets des vapeurs de pétrole ?)

Mais la marina d’Anacortes, ce n’est pas seulement l’arche de Noé. C’est aussi  l’abri d’un extraterrestre japonais, débarqué dans sa drôle de machine avec toute sa famille.  La machine en question c’est « Clear Water 10», un X-Yacht de construction danoise, transformé en souk, avec des bidons partout et des pare-battages qui servent de balançoires à Satoné, Kanané et Shizuné, les trois filles de Eiji et Junko. Une famille formidable !

Pour réaliser son rêve de voyage et de liberté, Eiji a potassé des livres pour apprendre à naviguer. Il a acheté  « Clear Water 10 » d’occasion et a quitté le Japon il y a trois ans, avec ses quatre femmes. Cap sur l’Alaska dont il est tombé amoureux et où il a pu scolariser ses filles. Après avoir passé plusieurs mois à Kodiak, Eiji a navigué seul avec ses deux plus grandes filles de 11 et 9 ans jusqu’à Anacortes. Junko qui est enceinte et la petite Shizuné (5 ans) ont pris l’avion. Ne leur parlez pas d’un retour à Tokyo, après Fukushima. Trop de pollution, trop d’enfermements, trop de pression sociale. Eiji et Junko planifient surtout leur retour en Alaska, après la naissance du bébé. En attendant, ils apprennent l’anglais. Sayonara et à l’année prochaine.

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