Corée des îles

(Par Sylvie)

Nous avons quitté les villes :  la frénésie un peu bling bling de Busan, le port  turbulent de Tongyeong. Et après une brève soirée toute francophone (rarissime plaisir depuis que nous sommes en extrême-orient) avec Cécile, Jean-Luc et Ulysse, l’équipage de Ad hoc, nous avons largué les amarres pour nous exiler avec plaisir sur des îles aux allures presque méditerranéennes.

C’est la saison des courges, des kakis, des mandarines et des patates douces, spécialité incontestée de Yokjido (2000 habitants). Elles s’empilent devant les magasins, dans les arrières cours. Elles jonchent les quais et les ruelles, sus forme de chips aptes à faire du bon « Soju », l’alcool local, dont certains pêcheurs – nous l’avons constaté en arrivant en amarrant Chamade – abusent sans vergogne : bing dans le ponton, bang dans le bateau de derrière et en avant plein gaz !

C’est sous la protection d’un Christ de Corcovado et de trois croix de néons raccoleuses que nous avons passé trois jours à Yokijdo, l’île où les habitants de Tongyeong vont se délasser le week-end. D’où les nombreux restaurants et l’écran géant du port qui vante en boucle, 24h sur 24, les beautés et bontés du site.

Et des beautés il y a de quoi s’en mettre plein les yeux. En prenant un peu de hauteur, sur des chemins pédestres toujours bien entretenus qui longent des plantations de camélias bourgeonnants à cette saison. Les Coréennes en raffolent pour s’en parfumer.

De là-haut (400 mètres) nous avons cru retrouver les Cornati de Dalmatie peintes en vert et les pins de la Mediterrannée. Un peu de sa douceur de vivre aussi, lorsque dans l’après-midi enoleillé, nous sommes allés nous asseoir dans une de ces gargotes où l’on vous pêche à l’épuisette votre poisson  pour vous le servir en shashimi tout frais de la bassine !

Quant aux bontés, elles ont été le fait de Jun rencontré par hasard sur la route. Avec  cette gentillesse un peu abrupte qui caractérise les Coréens, il nous a adoptés comme amis pour nous faire goûter le barbecue de porc local (dwaeji galbi) au resto du coin, les  patates douces que cultive sa maman et les mandarines de son jardin.  Il  s’est aussi appliqué à enrichir notre vocabulaire en nous faisant répéter toute une soirée : « Yokjido ghome matchita », les mandarines de Yokjido sont bonnes !  Et nous ne dirons pas le contraire, même en français.

Nous cherchions un peu plus de calme et de d’authenticité, nous en avons trouvé  à Sorido, une île au bois dormant qui nous a renvoyés à celles du Japon vieillissant.  Sauf que les maisons y sont bien plus colorées.

Une poste, une grande école, une maison communale où des fonctionnaires ne savent pas comment s’affairer, un petit bus qui deux fois par jour parcourt les 4 km séparant Yeondo de Yeokpo où arrive le ferry de Yeosu. A part un infaillible service public(poste, mairie, école) , nous repérons deux arrières boutiques d’alimentation, une mini banque et pas un seul bistrot. Mais où sont donc passés les 500 habitants de Sorido ?

Ils sont à la pêche ou alors aux champs, aujourd’hui, demain et ainsi de suite, jusqu’à l’hiver de leur vie.

Chaque jour que Dieu fait – sauf par mauvais temps – ,  Sorido sort de sa somnolence à 8h et à 16h,  c’est à dire aux heures du Ferry, cordon ombilical avec le « main land » et ballon d’oxygène de l’archipel du sud coréen.

Ce samedi,il  arrive avec une fournée d’ habitants de Sorido, partis faire leur shopping à Yeosu et qui, sitôt à terre, prennent d’assaut le bus, où on entasse pêle-mêle, hommes, femmes et marchandises. C’est un chassé croisé avec des petits groupes de randonneurs qui s’en retournent à la ville.  Ils ont pris le ferry pour se plonger dans la nature, observer les oiseaux et parcourir les sentiers de crête. Et ce dimanche, parmi ces promeneurs, se trouve Joon, notre ami de Séoul. Il a voyagé toute la nuit pour venir partager un bout de route avec nous. Lui aussi découvre Sorido où il n’a jamais mis les pieds. Que viendrait-il faire dans ce trou perdu ?

Mais comme il sait lire, c’est lui le guide. Il nous amène dans une de ces guesthouses  dont nous ne soupçonnions pas l’existence, parce que rien n’indique qu’elles existent, à part quelques idéogrammes.  Et nous sommes bien aise de nous y attarder pour prendre une douche et un repas très marin, en nous disant que l’éco-tourisme, est sans doute une activité d’avenir pour la minorité de non-vieux qui restent attachés à leur île.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.