Kirkenes : Dernière station avant la Russie
Par Marc à 08:45 :: 2009 Tromsö Cap Nord Kirkenes
Un poteau frontière jaune côté norvégien, un poteau vert et rouge avec un mirador au loin, cette fois ci plus moyen d’en douter, la Russie, c’est juste à côté.
Nous sommes à Kirkenes, petite ville de 3000 habitants tout au bout du Finamark, tout au bout de la Norvège.
Une ville qui depuis la chute du rideau de fer vit de ses contacts avec la Russie voisine. Ici même le nom des rues est indiqué en alphabet cyrillique.
Une ville presque sauvée par la fin de la guerre froide, puisqu’elle a permis à la ville de redémarrer après la fermeture de sa grande mine de fer en 1996, une vraie catastrophe économique locale.
Mais grâce à l’ouverture de la frontière, la ville vit de ses échanges avec Mourmansk sa voisine (Plus de 200’000 personnes passent la frontière chaque année, un bus quotidien) et surtout à Kirkenes, on répare désormais d’innombrables chalutiers russes. Ceux-ci, qui pêchent la plupart du temps en eaux internationales, abondamment équipés de matériel occidental, ne rentrent plus en Russie pour leur entretien, avant tout pour éviter les taxes douanières. Résultat : les quais de la villes sont encombrés d’une flotte quasiment exclusivement russe, le seul bateau norvégien restant celui de l’Hurtigruten qui fait escale chaque jour à midi, avant de repartir direction Bergen.
Une ville sans charme, mais dont la population est particulièrement accueillante.
Dès notre arrivée dans la baie qui abrite le « small boat harbour » (port pour les petits bateaux) des membres du club nautique nous ont fait de grands signes pour nous indiquer un ponton et nous aider à nous amarrer. Pour nous dire qu’on pouvait avoir de l’eau, de l’électricité et du gazoil. Et nous donner la clef du petit clubhouse où l’on peut prendre des douches. Et tout ça pour 50 nok (6 euros). Assez rare pour être signalé en Norvège : chaque jour on vient vers nous pour discuter, pour nous interroger sur notre croisière, pour nous raconter la région…
Décidemment le Finnmark est peut-être une terre rude et austère, mais habitée d’une population chaleureuse et ouverte. On en gardera un meilleur souvenir que celui des conditions météos rencontrées !
Mais qu’est ce que vous venez faire ici ?
Par Marc à 18:04 :: 2009 Tromsö Cap Nord Kirkenes
Vardö, à l’extrême est de la Norvège.
Petite île au bout de la péninsule de Varanger. Gros port de pêche toutefois. On y vient chercher abri, la météo annonce 35 nœuds pour la soirée.
A peine amarré à couple d’un petit chalutier, un pêcheur m’interroge :
-Vous venez pêcher ici ?
-Non
-Mais alors qu’est-ce que vous venez faire par ici ?
-On est en route pour la Russie ?
-Mais pourquoi ? … Seulement pour voyager ?
Qu’on puisse prendre la mer pour le plaisir, la découverte, leur paraît totalement incroyable.
Vardö est donc un port de pêche depuis des siècles. Il y a 15 ans il comptait 4500 habitants. Aujourd’hui juste 2000. Les grands chalutiers sont arrivés, le poisson n’est plus traité à terre, les usines de poissons fermées semblent juste là pour abriter les fantômes.
Mais la solidarité du marin n’est pas un vain mot. « Ne restez pas là, de ce côté du port avec la tempête de ce soir, ça va être dur pour votre bateau. Allez en face, le long des quais de l’usine abandonnée. Là vous serez sûr. » nous conseille notre hôte momentané.
On se déplace, l’amarrage prend du temps, d’autant qu’une houle entre dans le port.
Pas plus de 30 cm, mais largement de quoi rendre le contact avec le quai plutôt « rough ». On tisse notre toile d’araignée… et tout se passe bien quelques heures plus tard, même si le bateau roule lentement dans les rafales qui dépassent les 35 nœuds malgré l’abri des bâtiments. Reste à prendre son mal en patience, 2 autres coups de vent devraient suivre dans les 36 heures.
Un cap et tout a changé
Par Marc à 17:59 :: 2009 Tromsö Cap Nord Kirkenes
Le Cap Nord à peine dépassé et tout de suite l’environnement a changé.
La mer d’abord, avec tout de suite la houle, la grande houle de la Mer de Barents. « Rare qu’ici il n’y en ait pas, nous dira plus tard Christoph de Kongsfjord.
Et les ports, fait pour la pêche. Pas pour un voilier. La protection est souvent relative, le clapot pour ne pas dire la houle agite les bateaux. Pas de problèmes pour les pêcheurs amarrés le long des gros pneus qui garnissent les quais, mais avec 3 mètres de marnage, pour nous c’est plus compliqué. Il faut constamment surveiller.
La terre ensuite : c’en est fini des paysages presque riants de la côte nord-ouest, des îles et des chenaux, des petits fjords. Place à une terre grise, rocailleuse, pelée. Pas un arbre pour freiner le vent. Les rares bouleaux ne dépassent guère 60 cm. Ici à cette saison c’est l’univers du gris, du noir et du blanc.
On a l’impression de prendre des photos en noir et blanc. Les villages, les petites villes sont rares, perdues et dédiées uniquement à la pêche.
Ce ne sont que quelques maisons en bois, toujours en couleur, perdues sur la lande ou la toundra.
On y fait son jardin avec son imagination.
Dernier changement, la météo. Il fait grand beau à Oslo. Merci pour eux. Effet du hasard sans doute, mais qui dit bel anticyclone sur le centre de la Scandinavie, dit train de dépressions polaires au nord. Une tous les 2 jours. 30 à 35 nœuds de vent, rafales à 40, voire 50. Et ici tout est plus rude. L’avis de coup de vent, le gale warning » survient à 30 nœuds déjà. Il est vrai que dans ces conditions (eau à 4°, air à 5°) tout est beaucoup plus rude. Et que dire des locaux qui pêchent ici toute l’année, y compris dans la nuit et le froid polaire de janvier. Que dire sinon qu’ils méritent le respect.
21 mai, 20h10. On fait du sud !
Par Marc à 21:01 :: 2009 Tromsö Cap Nord Kirkenes
Le Cap Nord, nous l’avons franchi à 20h 35.
Mais la pointe la plus nord de l’Europe à 20h10, le « vrai cap nord », celui qui est juste un peu plus à l’ouest : C’est Knivskjelodden, une pointe rocheuse qui descend doucement vers la mer.
Evidemment, la falaise de Cap Nord, avec ses 300 mètres de haut, elle a une autre gueule.
Surtout vu d’en bas.
Parce qu’à voir là haut, les barrières, les touristes, le Tourist center et les 190 Nok (20€) à payer pour entrer dans la zone, c’est sans doute moins grandiose.
Reste que le passage est symbolique, par temps calme mais ciel gris. Juste de quoi lui donner son vrai caractère. Nous nous arrêtons juste après. À Skarvag, le « port de pêche le plus nord » dans le village « le plus nord » avec l’école « la plus nord »…
Et le lendemain, par un ciel sans nuage, nous verrons encore la célèbre falaise avant de terminer ce parcours à Honningsvag.
Où là aussi tout est « Nothernmost… » Même la brasserie.
Il y a certes celle de Tromsö, la célèbre brasserie Mack, « la plus nord du monde ». Mais à Honningsvag, le pub Bryggerie s’est décidé à faire sa propre bière artisanale. Son nom…
« Sorry Mack » !!!
Mais quand on veut en commander, la serveuse se dit désolée, la saison ne fait que commencer, la bière est en fabrication… il faut encore attendre 2 ou 3 semaines…
« Sorry Mack » peut-être, mais à Tromsö, la Mack…. We’ve got it !
Ivar, écolier du bout du monde
Par Marc à 20:55 :: 2009 Tromsö Cap Nord Kirkenes
Il s’appelle Ivar, il a 14 ans, il parle un anglais excellent et il est trop content de l’aubaine.
Un voilier, amarré au ponton, dans son village de Gjesvaer, à tout juste 10 milles du Cap Nord.
A peine amarré, il est là pour nous conseiller de reculer un peu le bateau, histoire de laisser de la place pour le bateau de son beau-père qui devrait rentrer sous peu de la pêche.
Mais le contact est tout de suite sympathique. Ivar aime les bateaux et entame la conversation.
Il vit au bout du monde depuis 3 ans avec sa mère prof et compagne d’un pêcheur de Gjesvaer. Une mère qui aime les lieux isolés, et Gjesvaer, c’est isolé : 200 habitants par plus de 71° Nord.
Mais 20 enfants, une école et 6 professeurs pour s’occuper d’eux, en partage avec la dizaine d’élèves de Skarvag, autre village tout proche du Cap Nord. Le service public en Norvège, cela veut encore dire quelque chose.
Ivar se réjouit déjà de cet automne, quand il quittera le Cap Nord pour aller rejoindre son père à Trondheim, la 3ème ville de Norvège, bien plus au sud, là où il poursuivra ses études.
Ivar qui se réjouit, mais qui pensera sans doute souvent à sa liberté de gosse du Grand Nord, à ses sorties en mer sur son canot à moteur, le sien, qu’il entretient avec soin pour affronter le clapot souvent tourmenté qui entoure les dizaines d’îlots éparpillés devant son village. « J’aime quand ça secoue » ajoute-t-il avec un petit sourire !
La direction du vent ? Facile… toujours juste droit dans le nez
Par Marc à 20:50 :: 2009 Tromsö Cap Nord Kirkenes
Tromsö – Honningsvag, 250 milles, un slalom entre les îles, mais un slalom au moteur.
Le vent, installé depuis plusieurs jours au nord-est, suit les méandres des fjords et canaux et nous l’avons évidemment toujours pile de face. Entre 5 et 15 nœuds.
Aussi régulier que l’Hurtigruten qui chaque jour passe et repasse le long de son long voyage de Bergen à Kirkenes.
Peu de voile donc pour Florence, Cédric et Pierre tous amateurs de jolis bords. C’est le copain Volvo qui fait sans broncher l’essentiel du travail.
Mais quelques moments étonnants comme ce contrôle de la marine norvégienne, qui demande nom du navire, des passagers ainsi que la dernière et la prochaine escale. Le moment de se rappeler l’alphabet radio.
Quant au port visé, n’ayant pas la carte sous les yeux, au micro ce fut…gngngnsund… à quoi l’officier norvégien, très classe, répondit « En prononciation norvégienne, c’est « Havoysund ».
Le soleil de minuit est de retour
Par Marc à 20:46 :: 2009 Tromsö Cap Nord Kirkenes
Aujourd’hui, ou plutôt cette nuit nous avons rendez-vous avec le soleil.
A Öksfjord, par 70° 40’ Nord.
Et il est au rendez-vous.
Temps splendide ce soir dans cette toute petite bourgade de 1500 habitants. Le soleil sort le grand jeu pour ces retrouvailles, et à minuit nous voilà sur une petite roche devant le port pour saluer le « Monsieur » qui ne va pas nous abandonner avant presque 3 mois, même s’il jouera sans doute souvent à cache-cache derrière les nuages.
Et qui dit soleil de minuit dit forcément bain de minuit !
Enfin version « grand nord » donc un peu « light ».