Gambier: la crise de la perle

Débarquer à Akamaru, c’est entrer dans le jardin d’Eden.

Allées ratissées et jardins luxuriants qui contrastent avec le sable blanc et le turquoise du lagon. Un jardin qui compte tout juste 9 habitants.

Là encore les marques du passage des pères Laval et Caret sont présentes.

Mais si l’église, une cathédrale devrait-on dire, est parfaitement entretenue, la nature a repris ses droits sur les nombreux bâtiments en ruine.

Akamaru est aussi une forme de Gambier miniature, révélatrice des problèmes de l’archipel, notamment celui de la crise de la perle.

« Moi, la culture de la perle, j’ai bien fait de l’arrêter il y a quelques années… »  Devant sa maison noyée dans la végétation luxuriante, Bruno nous souhaite la bienvenue et nous montre ses ruches. « Je fais 500 kilos de miel par année… ça ne me suffit pas encore complètement pour vivre, mais presque. Et j’ai moins de soucis que les perliculteurs qui ont pris la crise du Covid en pleine tête. Avec la fermeture des frontières ils ne peuvent plus aller proposer leurs lots de perles dans les ventes aux enchères qui se tiennent au Japon ou en Chine… »

Bruno, l’apiculteur

Et plus grave encore, aujourd’hui alors que le marché reprend, ils ont peu de perles à vendre, faute de greffeurs.

Car pour obtenir une perle de culture, il faut greffer un petit noyau au cœur de l’huître. Un geste délicat longtemps réservé aux greffeurs japonais. Mais aujourd’hui alors que la Chine est devenue le principal marché de la perle, ce sont des greffeurs chinois qui sont venus dans les fermes de Polynésie. Des greffeurs qui rentraient dans leur famille pour le nouvel-an chinois fin janvier. Ce qu’ils ont fait en 2020, juste avant l’arrivée du Covid… Et ils n’ont pas pu revenir! Et sans greffeurs, pas de perles… Et pour un bon moment puisqu’il faut 2 à 3 ans pour obtenir une perle.

Il y a bien quelques greffeurs polynésiens, formés à Rangiroa, mais ils sont peu nombreux. « Moi j’ai fait la formation, reprend Bruno, mais on avait de la peine à trouver du travail. Les Chinois, ce sont de vraies machines qui greffent 12 heures par jour pour faire un maximum d’argent. Nous les Polynésiens on n’arrivait pas à suivre, on n’était pas rentables » Peut-être qu’aujourd’hui les propriétaires de fermes perlières se disent « mais un peu tard, qu’on ne les y prendra plus ! » 

C’est un peu le même discours que tient Auguste dont les chiens qui nous aboient, viennent d’interrompre la sieste. Lui aussi ne veut plus travailler dans la perliculture. Son père, qui s’est fait un bon capital avec la perle, l’a aidé à investir dans la création d’une plantation de vanille. Après 3 ans, c’est maintenant les premières récoltes.

Auguste, devant sa vanille

« Je ne dépends plus désormais du marché de la perle… mais de la météo ! La vanille c’est délicat, il faut juste assez de pluie, mais pas trop, surtout durant les long mois de séchage où il faut éviter toute moisissure… Mais j’aime ça »

Bruno et Auguste, de beaux exemples de ces polynésiens, qui derrière une nonchalance apparente, sont en fait de sacré bosseur !

Et autre nonchalance (apparente?)… celle des requins pointes noires qui rodent dans les coraux

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