Chamade dans le détroit de Magellan

16 décembre, en contournant le phare de Fairway, perché sur son îlot, Chamade pénètre dans le détroit de Magellan.
Nous allons emprunter sa partie ouest trois jours durant, mais dans le sens contraire de l’illustre navigateur. Et ça change tout!
Car lorsque Magellan découvre en 1520 le passage reliant l’Atlantique au Pacifique, il le fait d’Est en Ouest, contre les vents dominants. Et quels vents!
Ici ils soufflent en tempête un jour sur trois, quand tout va bien.

Situé au sud de la barrière formée par la Cordillère de Andes, le détroit borde l’entonnoir formé par la Cordillère au nord et l’Antarctique au sud. C’est là que s’engouffrent les dépressions qui courent dans le Pacifique sud. Nous sommes à 53 degrés de latitude sud, au royaume des « Cinquantièmes hurlants ».
Des Cinquantièmes qui soufflent de nord-ouest… On ne peut rester qu’admiratif, face à ces marins du 16eme siècle qui réussirent à remonter ce détroit, sans moteur, contre ces vents dominants.
Que dire aussi de l’exploit de Joshua Slocum, premier navigateur solitaire à réaliser, en 1896, un tour du monde à la voile sur son « Spray », voilier de 11m30, sans moteur ! Slocum qui resta un mois bloqué dans une caleta du détroit à attendre des conditions acceptables, pour ne pas dire favorables.


Mais rien de tel pour Chamade. Depuis 2 jours nous avions repéré une bonne fenêtre météo. Pas question de la manquer! D’autant plus qu’entre quelques gros grains, le soleil parvient à envoyer de grands coups de projecteurs sur la scène de notre navigation. Voiles hissées mais arisées, Chamade file bon train dans un paysage de plus en plus somptueux à mesure que le détroit se resserre.
Fini, ou presque, la végétation souvent dense qui borde les canaux plus au nord. Ici l’univers est minéral, tout de rocs ridés par les années et torturés par la rudesse du climat, avec sur les sommets la neige encore bien présente, quand ce n’est pas des bouts de glacier qu’on aperçoit au deuxième plan.
Ce samedi soir, le nez collé à des cascades de roches, nous jetons l’ancre dans la Caleta Playa Parda, un amphithéâtre minéral qui se révèle d’autant plus grandiose que le soleil joue avec le ciel noir d’un grain menaçant.


Nous voilà dans cette Patagonie, royaume du vent mais aussi des lumières!
Dans deux jours nous nous glisserons encore plus au sud, par le canal Acwalisnan, pour filer vers le détroit de Beagle, Puerto Williams et le Cap Horn. Nous serons alors par 55 degrés 57 minutes Sud. Plus au sud, il ne restera « que » l’Antarctique, que nous avions visité fin 2013. De quoi faire un beau maelström de souvenirs et d’émotions!

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