La Tierra del Fuego, selon la Bible

Pour naviguer dans les canaux de Patagonie, nous avons emporté une Bible. Et chaque jour, pour notre salut, nous lisons et relisons les évangiles de Mariolina Rolfo et Giorgio Ardizzi, auteurs italiens d’un super guide nautique, surnommé par les voileux du coin: « la Bible ». Elle nous donne des indications détaillées sur tous les mouillages possibles, y compris des détails historiques. C’est ainsi que nous avons appris que tous les lieux de ce puzzle sans fin ( et impossible à rendre dans son ensemble) que sont les canaux de Patagonie, ont plusieurs fois changé de nom, au gré des explorations, des conquêtes, des guerres, de la colonisation et de l’évangélisation qui ont effacé les dénominations indiennes. À commencer par la Tierra del Fuego, la Terre de feu où, grâce à notre Bible, nous sommes arrivés sains et saufs.

Cette appellation donnée par un écrivain de la cour, a été homologués par le roi d’Espagne, au XVIIIème siècle. Jusque là, la grande île ( qui avait plusieurs noms indiens ) figurait sur les cartes sous le nom Tierra de Jativa, du nom du village natal du géographe et pilote d’une expédition espagnole de 1619.
Un siècle auparavant, lorsqu’un certain Fernando de Magallanes entrait avec sa flotte dans le détroit qui portera son nom, il vit partout des feux allumés par les Indiens pour avertir toutes les tribus, de l’arrivée de bateaux étrangers. L’imagination des gens se mit en branle: les feux de Magellan devinrent un volcan, le Volcan Apaca mentionné jusqu’au XXeme siècle sur les cartes au nord de Ushuaia, mais qui n’a jamais existé.
Il y aurait mille et une histoires à imaginer en lisant les noms des morceaux du puzzle patagon, surtout lorsqu’ils sont déclinés en espagnol : Baia desolada ( ainsi nommée par Cook ), baia fiasco, baia complicada, caleta cinco Estrellas ( 5 étoiles ), caleta Scherzo ( plaisanterie en italien) puerto Nutland etc..
Chaque nation exploratrice ou conquérante a laissé son empreinte en Terre de feu : on y trouve les glaciers Holanda, Francès, Italia, le seno España et j’en oublie.

Certains détroits, canaux, péninsules, îles, arborent majestueusement, leurs noms illustres : Cockburn, l’amiral anglais qui a escorté Napoleon jusqu’à son exil de St Hélène, Darwin, Pasteur, Dumas ( même s’il ne s’agit pas de l’écrivain ) Cook, Garibaldi, Agostini du nom du père Alberto de Agostini explorateur et évangélisateur qui fut le premier à traverser la cordillère de Darwin, en 1913. Il y a aussi la caleta Neruda, ainsi baptisée par les auteurs de la Bible en l’honneur du poète chilien et un phare Beauvoir qui, à tord ou à raison a fait vibrer ma fibre féministe.
Aucune trace en revanche de son altesse royale d’Araucanie et de Patagonie, Orélie-Antoine de Tounens, dont je vous conterai l’histoire au prochain épisode.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.