L’île des Gauchos

Quarante habitants et le double en été. Un chapelet de maisonnettes sur pilotis adossé à une forêt touffue et pentue ; un chemin de terre qui se déroule comme un long ruban et un peu plus haut, accrochés à la pente, quelques logis perchés au bout d’un escalier, enfouis sous la verdure, les herbes folles et les fleurs. Vous êtes à Tenakee Springs, le phalanstère naturo-bobo d’Alaska, l’île des (ex) gauchos ou l’utopie communautaire est devenue réalité.

Il n’y a pas de voiture à Tenakee. On y vient en bateau ou en hydravion et on roule à vélo, en mini voiture électrique ou en quad. Notez bien que comme il n’y a pas de routes pourquoi y aurait-il des voitures ? Pourtant il y a un abri-bus. C’est ainsi que les habitants appellent la cahute en bois où chacun vient déposer ce dont il ne veut plus – des habits, des livres, des skis, des appareils ménagers, des jouets, bref tout et n’importe quoi – et où chacun peut se servir de ce qu’il veut dans cette cabane d’Ali Baba-cool.

En face de l’abri-bus, il y a le resto, salon de thé du village qui fait aussi office de boutique souvenirs. Avant il y a la poste (oui aux USA on maintient une poste pour quarante habitants !, après, le liquor store–épicerie depuis 1889 (toujours la même) la bibliothèque high-tech et l’école (moins de 10 élèves).

Mais surtout entre deux, il y a les bains. 9h-14h et 18h-22h pour les femmes, 14h-18h et 22h-9h du matin pour les hommes. Seul règlement : nudité complète exigée et pas de savon dans la vasque. Parce que la vasque est alimentée par une source d’eau chaude (40°) légèrement sulfureuse qui vous fait la peau douce comme de la soie. C’est un conseil restreint qui a été chargé par la municipalité de concrétiser le projet d’exploiter (pour pas un rond puisque les bains sont gratuits) les hots springs pour le bien-être de la communauté et de ceux qui lui rendent visite.
J’ai eu pour ma part le privilège de barboter avec la postière qui a fait trempette, au risque de faire déborder la vasque, avant de retourner au boulot. C’est elle qui m’a briefé sur les statistiques de Tenakee. Pour le reste, nous avons découvert tous seuls que les habitants de Tenakee Spring ne manquent ni d’humour, ni de poésie, ni d’eau puisque, outre les sources, il paraît que la meilleure saison pour y vivre est l’été « quand il y en un » !

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