Menbal : le marin aux pieds nus (et à la phalange coupée)

« Menbal », en coréen, signifie « pieds nus ». Et c’est devenu le surnom de Lee Jae-Ho qui déteste au plus haut point mettre des chaussures. A tel point d’ailleurs que pour tout le monde à Busan, c’est « Menbal ».

Menbal qui vit sur son voilier au bout du ponton n°3 de la marina olympique de Busan. Là au pied des gratte-ciel, il a créé la « Barefoot Yacht School ». Et c’est ainsi qu’il prodigue des cours de voile, tout en ne manquant pas une occasion de participer aux régates qui commencent à se multiplier sur la côte sud de la Corée. Menbal qui parle très bien l’anglais (« je l’ai appris en regardant des séries américaines à la TV !») est toujours prêt à aider les rares voiliers étrangers qui pointent leur étrave en Corée. Devenu un des amis de Jean-Claude et Marlène d’Anthéa, il les a accompagnés l’été dernier de Busan jusqu’à Vladivostock.

Menbal et son grand copain Cho qui vont se charger de nous faire découvrir quelques particularités culinaires de Busan. Comme la grande soupe de fruits de mer (Poulpes, coquillages et crustacés)

Ou encore la baleine, préalablement bouillie, qui se mange à la manière d’un shashimi, froide et en fines tranches.

Cho et Menbal dans un restaurant de baleine à Busan
Une baleine… oui mais en fines tranches

Tout se mange, depuis la couche de graisse sous la peau, la viande elle-même et les intestins. Surprenant, très loin des steaks de baleine dégustés en Norvège, mais très bon ! Un menu rare en Corée (qui a signé la convention internationale de protection de la baleine) où seules les rares baleines prises au piège accidentellement dans les filets ou pièges à poisson, sont consommées. (c’est du moins la version officielle)

C’est dans cet unique restaurant servant de la baleine à Busan que Menbal va nous expliquer la raison de son autre particularité physique : La phalange manquante de son index droit :

Un accident ? Pas du tout… une mutilation volontaire !

Pour ne pas partir à la guerre. A sa majorité, Menbal qui est très ancré à gauche, refuse catégoriquement de rejoindre l’armée sud-coréenne, aux ordres de la dictature de Park Chung-Hee. Et le seul moyen de réaliser son objection de conscience, c’est de se couper la phalange droite, le rendant ainsi incapable d’appuyer sur la gâchette.

Aujourd’hui encore Menbal est très critique envers la politique agressive de son pays contre le voisin et « frère » du Nord. « Avec les Américains, l’armée coréenne multiplie les exercices et démonstrations de force envers la Corée du Nord. Cela n’excuse pas la dictature du Nord, mais cela explique pourquoi, de peur de disparaître, le régime de Kim Il-Sung et de ses descendants fait tout pour avoir la bombe atomique. Ce n’est pas ainsi que l’on fera tomber la Kim Jong-Un. C’est au contraire en multipliant les gestes d’apaisement et de contact. Comme l’a fait Kim Dae-Jung (président démocrate du sud) qui a rencontré Kim Jong-Il, fils de Kim Il-Sung, en 2000. Ou comme l’a fait son successeur Roo Moohyun. (Cela s’appelait la « politique du rayon de soleil »). Mais aujourd’hui, avec la présidente Park Geun-hye (fille de l’ancien dictateur Park Chung-Hee) on en est revenu à la politique de la guerre froide et de l’intimidation »

Une vision étonnante, dissonante, dans un pays plongé dans la parano et en permanence sur les dents. Mais à méditer. Faut-il rappeler que si le régime soviétique est tombé, ce n’est pas sous la menace militaire ? Et le mur de Berlin n’est-il pas tombé sous les assauts d’une population qui rêvait des bienfaits du libéralisme économique de l’ouest?  Même si aujourd’hui nombreux sont ceux que sa dureté et ses excès ont plongé dans la nostalgie.

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