Alaska 2018, annus horribilis ?

« Les ours sont en train de mourir de faim » ! C’est le vieux Stan, qui nous le dit, à Tenakee Springs, devant un…deux… trois verres de vin que nous partageons chez ses amis Juan et Cathy. Et même s’il est un peu beaucoup éméché, on le croit volontiers

Car cette année, l’Alaska nous a semblé manquer passablement de « wildlife ». Depuis le mois de juin nous  n’avons aperçu  que quelques ours le long du rivage. A Geographic Harbor ( Katmai), réputée pour ses colonies de grizzlis (nous en avions vu une bonne dizaine, il y a 6 ans),  rien. Ou presque. Sans doute étions-nous un peu tôt en saison pour les observer sur les plages. Mais même en d’autres régions un mois plus tard, l’absence de faune sauvage nous a frappés. Et nous avons dû nous rabattre sur des petites bêtes plus familières.

Où sont passées les  orques et les baleines? Les rencontres avec les cétacés ont été rarissimes.  A Elfin Cove,  une affiche nous apprend qu’entre 2013 et 2017 on a répertorié une chute de 40% du nombre de baleines dans la région.  Parmi celles qui ont été repérées avec leurs petits, plusieurs montraient des signes de malnutrition et le nombre de baleineaux incapables de survivre durant leurs deux premières années de vie, a  augmenté de façon  significative

Dans le Pince William Sound, c’était quasiment le désert squatté presque exclusivement par des familles nombreuses de loutres, réintroduites après le désastre de l’Exon Valdez. Même les phoques et les lions de mer n’étaient pas vraiment au rendez-vous. Et surtout, plus de danse du saumon dans les baies, devant les rivières !  Il y a six ans et l’an dernier à cette période, nous assistions à des ballets endiablés. Ça bondissait de partout.

Et notre cockpit était  gracieusement rempli par les pêcheurs. Cette année, un plouf par ci un plouf par là. Les saumons sont fatigués et seul un  jeune pêcheur a consenti à nous vendre sous le manteau ( c’est interdit) un saumon coho, faute de sockeyes. Nous nous sommes tout de même régalés.

Dans les ports, tout le monde est unanime : le « run », la remontée dans les rivières, n’a pas encore eu lieu et l’on se plaint du peu d’or rose à se mettre sous la dent. Du coup, on se rabat sur le flétan.

Mais le « halibut » ne rapporte pas autant que le saumon. Et, plus fâcheux encore, les ours ne peuvent pas se gaver pour l’hiver. Bon, il y a encore abondance de baies, plus nourrissantes pour l’ours que le saumon, paraît-il. Espérons que ça fera l’affaire pour permettre une bonne hibernation.

2018, annus horribilis pour l’Alaska ? Ben… disons que le poisson est en diminution depuis plus de 20 ans, ce qui a conduit les autorités à prendre des mesures drastiques pour préserver la ressource.   Parallèlement, la pression touristique augmente : pêche sport-loisirs en bateau à moteur super puissants, croisières en paquebots géants, whale ou bear watching en bateau ou en hydravion : le tourisme constitue désormais la deuxième ressource économique après le pétrole et…avant la pêche.

Et puis, la terre se réchauffe aussi aux Etats-Unis. Les glaciers se retirent, les poissons se font la malle, la wildlife migre pour s’adapter. Bref tout ce qui fait l’attrait de l’Alaska, va-t-il disparaître ?

En quittant Tenakee Springs, un banc de baleines chasseresses a tenté de nous prouver le contraire. Nous en sommes restés bouche bée par le spectacle.

Et le lendemain, rebelote, dans le Peril strait  (île de Chichagof). Cette fois c’est une meute  orques voraces qui fait bombance, sous l’œil des objectifs des touristes. Et j’en profite.

Deux rencontres d’autant plus magiques qu’elles ont été rares.

P.S : j’ouvre une parenthèse pour partager mes nouvelles connaissances : les oursons naissent tous « prématurés« . Car leur gestation ne dure que deux mois. Ils naissent aveugles, sans poils, avec un poids 250 grammes. C’est la tanière de leur mère qui va leur servir de couveuse pendant les mois d’hibernation. Maman ours se réveille régulièrement pour nourrir et nettoyer ses petits. Elle mange leurs excréments (très nourrissants) et fait disparaître toue odeur qui pourrait attirer des prédateurs. Quand il sort de sa tanière, l’ourson pèse environ 15 kilos. Seuls 25 % des bébé ours noir arriveront à survivre durant leurs deux premières années ( c.f. Alaska’s bears by Bill Sherwonit).

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